La loi du 31 décembre 1991 a marqué une étape fondatrice dans le paysage de la formation professionnelle en France en instaurant le droit au bilan de compétences pour tous les salariés. Ce texte législatif a non seulement défini les objectifs et le cadre de cette démarche d'introspection professionnelle, mais a également créé le Congé de Bilan de Compétences, permettant aux employés de s'absenter pour analyser leurs aptitudes et définir un projet professionnel. Cette loi a ainsi posé les bases d'un outil majeur pour la gestion de carrière et l'évolution professionnelle des individus.
Contexte et ambitions de la loi de 1991
À la fin des années 1980 et au début des années 1990, le marché du travail français est confronté à des mutations économiques rapides. La nécessité d'adapter les compétences des salariés aux nouveaux besoins des entreprises et de sécuriser les parcours professionnels devient une priorité. C'est dans ce contexte que la loi n° 91-1405 du 31 décembre 1991, relative à la formation professionnelle et à l'emploi, est promulguée. Son ambition principale est de donner aux salariés un outil pour devenir acteurs de leur propre évolution. L'objectif n'est plus seulement de former à un poste, mais de permettre une réflexion globale sur une carrière.
Les dispositions clés de la loi
Ce texte de loi a introduit plusieurs concepts et dispositifs majeurs qui structurent encore aujourd'hui le bilan de compétences.
La reconnaissance d'un droit individuel
Le principal apport de la loi est de faire du bilan de compétences un droit individuel pour le salarié. Il ne dépend plus uniquement de l'initiative de l'employeur. Tout salarié justifiant d'une certaine ancienneté peut demander à bénéficier d'un bilan, que ce soit dans le cadre du plan de formation de l'entreprise ou de sa propre initiative. Cette loi s'inscrit dans un mouvement plus global d'évolution législative du bilan de compétences en France, posant les fondations de son accessibilité.
La création du Congé de Bilan de Compétences
Pour rendre ce droit effectif, la loi instaure le Congé de Bilan de Compétences. Ce dispositif permet à un salarié de s'absenter de son poste de travail pour une durée maximale de 24 heures afin de réaliser son bilan. La rémunération est maintenue et les coûts de la prestation sont pris en charge par des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), ancêtres des OPCO actuels. Cette mesure a été déterminante pour démocratiser l'accès à la démarche.
Un cadre réglementaire pour la prestation
La loi de 1991 ne se contente pas de créer un droit, elle encadre également la prestation. Elle définit le bilan de compétences comme une démarche en trois phases distinctes, une structure toujours en vigueur aujourd'hui :
- Une phase préliminaire : pour confirmer l'engagement du bénéficiaire, définir et analyser la nature de ses besoins.
- Une phase d'investigation : pour analyser les motivations, les intérêts professionnels et personnels, et déterminer les possibilités d'évolution.
- Une phase de conclusion : qui, par la voie d'entretiens personnalisés, permet de prendre connaissance des résultats et de prévoir les principales étapes de la mise en œuvre du projet.
Le texte insiste également sur le consentement du salarié, la confidentialité des résultats (qui sont sa seule propriété) et l'obligation pour les organismes prestataires de respecter un cahier des charges qualitatif.
L'impact de la loi sur le monde du travail et ses évolutions
L'instauration de ce droit a eu des conséquences profondes. Pour les salariés, elle a offert une opportunité formelle de faire le point sur leur carrière, de gagner en confiance et de construire un projet d'évolution, de reconversion ou de formation. Pour les entreprises, le bilan est devenu un outil de gestion des ressources humaines, utile pour accompagner la mobilité interne et anticiper les besoins en compétences.
Cette structuration initiale du marché a été le socle sur lequel se sont appuyées les réformes suivantes. Au fil des ans, le dispositif a évolué, notamment avec la modernisation et la libéralisation du marché introduites par la loi Avenir Professionnel en 2018, qui a intégré le bilan de compétences au Compte Personnel de Formation (CPF). La définition légale reste encadrée par le Code du Travail, notamment son article L6313-4.
Conclusion : une pierre angulaire pour la gestion de carrière
En conclusion, la loi du 31 décembre 1991 est bien plus qu'un simple texte réglementaire. Elle représente un tournant majeur en reconnaissant l'importance pour chaque individu de pouvoir analyser son parcours et construire son avenir professionnel. En créant un droit et les moyens de l'exercer, elle a posé une pierre angulaire du système de formation professionnelle et de gestion de carrière en France, dont les principes fondamentaux perdurent encore aujourd'hui.